Feuilleton: Pluie de Balles, Chapitre 2 Ivre Morte

Publié le par Mike

« Qu'est ce que tu fiches chez moi, Kareen? Lançai-je, à ma visiteuse. Connaître son identité ne me rassurait pas plus , car je savais qu'elle n'était pas recommandable. Il y eut un blanc durant lequel aucune de nous deux ne bougèrent, puis j’esquissai un sourire.

-C'est ça que tu cherches? Dit la femme en exhibant mon Beretta 92 .Et puis qu'est ce que t'as à sourire bêtement?

Bretta 92

Bretta 92

Je faisait maintenant face à la grande blonde , et continuant de ne rien dire, mon interlocutrice n'eut qu'un ricanement en guise de réponse.

-Tu te payes ma tête?

Je n'avais pas décuvée, si bien que j'explosai de rire avant de prendre enfin la parole:

-Tu...Tu as besoin de moi, n'est ce pas?

-Même si cela m'est dur de le reconnaître, c'est le cas...

Je jubilais à l'idée que mon ancienne rivale puisse avoir besoin de moi

-Tu peux toujours crever!

-Mais tu es la seule à pouvoir nous aider, et puis je pense que cette affaire t' intéressera.

-Dis toujours avant que je ne te mettes à la porte. De quoi s'agit-il ?

Kareen marqua un silence théâtral afin de créer un effet de suspense pour commencer son récit:

-Voilà, il y a deux jours, on a retrouvé le cadavre d'une étudiante en droit, égorgée dans une ruelle. On a d'abord pensé à un viol qui aurait mal tourné mais l'autopsie à révélée que ce n'était pas le cas. Cependant, elle à eue un rapport sexuel consenti peu de temps avant de se faire saigner...

J' en avait entendu parler le matin même aux informations, pendant que je bouclais le compte rendu destiné à mon client. Bien que la radio ne disait pas quelles étaient les causes de la mort et ne révélaient pas non plus l'identité de la victime, le ton du présentateur laissait entendre qu'il aurait voulu pouvoir en dire plus, ce qui avait capté mon attention.

-C'est peut être un larcin ou...

Kareen me coupa:

-Non plus, bien qu'elle avait un joli petit pactole pour une étudiante, ce qui m'étonne assez d'ailleurs.

-Ou alors ton étudiante tenait compagnie a quelques messieurs hauts-placés de la ville pour financer ses études. Si elle les faisait chanter, c'est un mobile suffisant non?

La piste que venais d'énoncer la brillante détective que je suis semblait bien plus probable que le larcin aux yeux du Capitaine Adler, ce qui lui fit voir que son ancienne collègue n'avait pas perdue la main.

-Je peux considérer que tu es partante alors?

-Que les choses soient claires, je le fait pour cette pauvre gamine et pas pour te faire plaisir. Lui dis-je en essayant de paraître la plus agressive possible.

-Au fait, tu ferais mieux de te pointer à l'heure si tu veux du café chaud. Demain matin à huit heures, je te ferais un briefing, avec une visite guidée de la morgue où tu pourra jeter un œil au corps. Je sais que tu n'as jamais fais confiance au légiste.... Et si tu es sage,je te rendrais ton Beretta !

Dix minutes plus tard, la blonde avait fini par s'en aller. Je regardai l'heure à nouveau: Il n'était pas loin de vingt heures trente, et je n'avais pas encore mangée. Tiraillée par la faim, je me décidai à aller chercher quelque chose à grignoter, étant trop fatiguée pour cuisiner quoi que ce soit.

Mon choix se porta donc sur un des nombreux petits fast-foods indépendants, qui étaient bien souvent plus conviviaux, et où la nourriture,à défaut d'être saine, était meilleure. Je m'accommoderai d'un sandwich au poulet avec un café bien noir dans l'espoir de décuver plus rapidement, mais tout ce que je réussis à faire, c'est chasser le sommeil au loin.

Une fois rentrée, je voulu aller me coucher de suite. Une douche rapide avant d'enfiler mon chemisier par dessus mes sous-vêtements me suffis, avant de me diriger vers la chambre où le chaos régnait en maître absolu -mais c'était uniquement de ma faute cette fois-ci-. Je m'installai sur mon lit, assise face au grand miroir qui ornait la porte de la penderie.

Je soupirai un grand coup et commençai à me déboutonner le chemisier, lentement. Bouton après bouton, le chemisier qui s'ouvrait laissait apparaître une cicatrice qui se trouvait sur mon flanc gauche. Deux ans auparavant, lors de ma dernière enquête en tant que policière, j'avais essuyée une série de coups de feux. Un tir en particulier faillit me coûter la vie. La balle de calibre 9mm était venue se loger près du rein et avait causée une hémorragie. Cependant, j'avais pu survivre assez longtemps pour que les secours m'évitent une mort lente et douloureuse en me vidant de mon sang. Je regardai mon pendentif -une alliance- les yeux pleins de larmes et me coucha. Ça me pris longtemps pour m'endormir cette nuit là, sans doute à cause du café que j'avais bus un peu plus tôt dans la soirée.

* * * * * *

-Sherry...

-Ouais, c'est ça ! Vas-y, sert toi poulette ! Dit Patrick, le patron du « Marlowe's ».

J'attrapai un verre, qui n'était pas un verre à pied,mais une flute à champagne, ce qui étonna les deux compères. Mais comme j'avais l'habitude de le dire, l'alcool et moi, ça fait deux. En débouchant la bouteille, l'odeur de vieille liqueur avait envahit l'air ambiant, et ses effluves fruitées ne faisaient que renforcer l'envie d'y goûter. Une fois le liquide servi, je le fis tournoyer dans le verre en le sentant,avant de me décider à boire.

Doucement,je portai le breuvage à mes lèvres. J'y goûtai comme s'il s'agissait d'un grand cru, me rinçant la bouche avant que le liquide ne coule au fond de ma gorge. Cette vision émoustilla l'inspecteur, et je dois avouer que c'était un peu le but recherché. Je bus le reste du verre cul-sec, la dernière goutte de sherry restait suspendue à mes lèvres humides, comme une parole inachevée. Les lumières des néons s'y reflétaient dessus, ce qui produisait un effet "gloss". Je fis cependant une drôle de grimace avant de lâcher un gros « haaaa...», ce qui gâcha la scène.

-Alors ?

-C'est exquis ! dis-je en prenant un air de connaisseuse.

-On va voir si tu tiens bien l'alcool.... Tu as pris un mauvais verre, et en plus,t'y est pas allée de main morte !! lui dit Patrick, le barman .

-10 € que ça va lui suffire pour être faite ! paria Samuel, dont la timidité avait été étrangement effacée par le Bourbon.

-20 que dans dix minutes elle est bourrée ! » surenchérit le barman.

Dix minutes plus tard, Samuel donnait les billets à Patrick, pendant

que celle qui était l'objet du pari racontait des blagues en Gaélique. Malheureusement pour moi, mon coéquipier qui avait passé son enfance à New York ne comprenait rien ; mais quand il vit la tête du barman, il comprit que cette blague n'avait aucun sens en Gaélique non plus. Je tentai de me lever mais je titubai avant de me sentir partir en arrière. En parfait gentleman, il eut le « réflexe » de me rattraper par la taille. Il aurait préféré pouvoir le faire dans d'autres circonstances, s'attarder sur «mes courbes graciles, me saisir et m'embrasser»,comme il me l'avouerai plus tard. Cependant,jamais Samuel n'aurait osé,il avait bien trop d'estime pour moi pour abuser d'une fille de la sorte, et ne l'aurait jamais fait quelle que soit la femme qu'il ait eu en face. Il dû me prendre sous son bras pour me maintenir en équilibre pendant que Patrick nous regardait partir, bras dessus bras dessous-surtout pour que je puisse marcher. Il avait compris qu'il y avait quelque chose entre nous, seulement, nous l'ignorions encore.

* * * * * *

Le portable se mit à sonner. Puis encore une fois. J'émergeais lentement de mon sommeil pendant que le téléphone persistait à sonner. Assise sur le lit, ma crinière ardente sur mes épaules pâles dénudées; ma frange flamboyante qui retombait sur le front,faisait ressortir le vert de mes yeux dans le miroir, je décrochai:

-Allô? Allô!

Personne à l'autre bout du fil. Hébétée, je réalisai que c'était mon alarme de réveil ; mais après tout, cet instant ridicule ne serait jamais connu de qui que ce soit pensai-je. Je me levai en souriant, enfilai un haut sans manche grenat qui comportait un col roulé très ample avec le dernier pantalon propre qui restait dans la commode.

Lorsque je sortis de la chambre, je constatai ( comme tous les matins ) que le cabinet était dans un désordre monstre et songeai à faire un peu de ménage avant de partir. Puis je revins à la raison en me disant que le ménage attendrait, car j'avais bien trop à faire. Ainsi commençait une journée type à l'agence de Détective Brandon.

J'enfilai ma veste à la hâte puis m'assurai que cette fois-ci, la porte était bien verrouillée. Je vis ensuite que le seau qui recueillait l'eau des gouttières avait finit par déborder pour déverser son contenu sur les marches glissantes que je dévalai en lâchant un « Et merde ! ». Je sortai en trombe par la porte juxtaposée à la vitrine du « Marlowe's » en regardant l'écran du portable : déjà vingts minutes de retard... Me dépêchant autant que possible, les gens qui allaient travailler virent passer une tornade rousse débraillée remonter O'Connel Street et bousculer un groupe d'enfants qui se rendaient à l'école

Le temps d'arriver au commissariat central, le téléphone se mit à sonner, et cette fois, c'était bien Kareen :

-Oui? Demandais-je, feignant la surprise

-Je suppose que tu ne dois plus être plus bien loin du commissariat central, non?

-Euh....Oui !

-Bon, je suis désolée, mais tu va devoir marcher encore un peu...

-Pourquoi ?

-On a une nouvelle victime, et j'aimerais avoir tes lumières.

-Comment avez vous pu vous passer de moi durant tout ce temps !? Demandai-je, raccrochant alors au nez de Kareen.

Puis me rendant compte qu'emportée par les mots, je n'avais même pas demandé où se trouvait la scène du crime, j'activai mes cellules grises.

-Tu parles d'une Détective, même pas fichue de demander où on est ! grommelait Kareen quelques rues plus loin lors de mon arrivée.

Étonnée,Kareen demanda comment j'avais fait,ce à quoi je lui répondis:

-Mesdames et messieurs, c'est l'heure de mon show de déduction !

Je n'étais pas du tout le genre de femme à chercher la lumière, pourtant, lorsque je me retrouvais en présence de Kareen, cherchais par tous les moyens a éclipser celle qui m'avais tant humiliée par le passé.

Tous les policiers se retournèrent et le Capitaine Adler devait croire que sa rivale était encore sous les effets de l'Alcool. je poursuivis :

-Lorsque tu m'as appelée, j'ai remarqué que le fond sonore était pratiquement inexistant, j'ai alors compris que ce devait être un endroit peu fréquenté des voitures, voire même piéton .

-Mais il y a des tas d’endroits piétons sur Dublin, pourquoi ici en particulier ? Demanda Kareen .

-Car grâce à cet absence de trafic, j'ai pu entendre ce qui se passait derrière.

J'ai d'abord entendu un de tes subordonnés, qui faisait du lèche-vitrine dire :

« Woaw, cette boutique fait même les figurines Goldobrank ! », je me suis alors concentré sur les boutiques de comics et de mangas, continuait d'expliquer la reine de la déduction pendant que Kareen jetait un regard noir à tous les policiers présents sur la scène de crime.

-C'est vrai ! Quel est celui qui s'amuse au lieu de bosser !! rugit Kareen. Les policiers, tétanisés se montrèrent tous du doigt les uns-les-autres, telle une classe de maternelle. Bon, continues « Brandy »,on t'écoutes.

-Ensuite,, j'ai entendu un bruit métallique, puis un policier dire : « Regardes moi les ceux-là ! Comme si ces tourtereaux croyaient vraiment que cet attrape touriste fonctionne pour de bon ! » C'est alors que j'ai pensé au Halfpenny Bridge.

-Pourquoi le Halfpenny Bridge ?

-Tu n'est pas au courant ? Il y a une légende qui dit que lorsque l'on accroche un cadenas à l'une des arches ( d'où le bruit métallique ) la personne reviendra avec celle qu'elle aime, de plus, la boutique de mangas m'a renseigné sur le côté du pont où vous vous trouviez.

-Concernant le pont, il ne pouvais y avoir que toi pour savoir des choses aussi inutiles.... Dit Kareen d'un ton méprisant.

-Bon, voyons à qui nous avons affaire, dis-je en me tournant vers la victime.

Je m'approchai du cadavre, une jeune femme qui avait subit le même sort que l'étudiante en droit, tuée quelques temps auparavant. Les rayons du soleil, qui filtraient au travers de la brume matinale, éclairaient péniblement la scène du crime d'une douce lumière dorée.

-Pourrais tu donner une fourchette concernant l'heure du décès? Demanda la policière.

-Si elle est restée dehors toute la nuit, ça risque d'être difficile. Il ne faut pas oublier que la température extérieure et la forte humidité due à la pluie jouent un rôle prépondérant sur la vitesse de refroidissement et de durcissement du corps...

-Donc, enchaîna Kareen, concrètement, on ne peut ni se fier à la rigidité cadavérique, ni à la température du foie.... voilà qui est assez embêtant. dit-elle en faisant la moue.

Je me penchai sur le corps, afin de l'examiner quelques instants. Agenouillée, tout en prenant soin de ne pas être en contact avec la flaque de sang diluée ( due à la pluie qui avait duré toute la nuit ), je tatai le corps a divers endroits, mais comme la victime était sur le ventre, il était difficile de s'avancer sans donner de conclusions hâtives. Je me relevai et dis à Kareen :

-Le corps est froid, et il est parfaitement dur. A première vue, je dirai qu'elle est morte depuis au moins hier soir,mais il me faudrait la retourner pour me prononcer définitivement et déterminer la cause du décès.

-BON LES GARS !!! Hurla Kareen, prenez un maximum de clichés, on va retourner le corps.

Et pendant que les policiers s'affairaient comme des fourmis, Kareen me dit :

-Tu ne regrettes pas d'avoir quitté la police ? Avec ton sens inné de la déduction, tu aurais pu aller loin dans les grades... Sans compter tous les avantages que nous avons et qui nous offrent un champ d'investigations beaucoup plus large.

-Non, je me contrefout des grades. Ce qui m'importe, c'est la soif de justice. Même si nous avons en commun d'être accroc à l'adrénaline produite par la capture d'un criminel, je ne suis pas une carriériste comme toi.

-Je suis peut être une carriériste, mais au moins, je suis reconnue pour mon travail,tandis que toi Sherryl, tu vit dans l'ombre, les gens te voient comme une fouineuse. Après tout, qui voudrait témoigner devant quelqu'un qui n'a pas d'insigne ? Questionna la flic d'un air méprisant.

- Tu as tout faux, rétorquais-je, car c'est dans l'ombre que les langues se délient. Souvent, les gens ne racontent pas tout à la police de peur de dire des choses non nécessaires à une enquête. Et ce n'est qu'après, que nous, les enquêteurs de l'ombre, fondus dans la masse, recueillons ces petits riens qui mis bout à bout, permettent de tenir les coupables en échec !

-Quel discours! On ne pouvait pas entendre mieux de la part de la meilleure détective de Dublin, mais moi au moins, je sais que j'ai une certaine sécurité financière...

-Et moi donc! Si je te disais combien on m'a payée ma dernière filature, tu deviendrais folle!

-Combien?

-Le client m'a donné pas moins de 1500 euros pour suivre sa copine tout le weekend …..

-Sacrés honoraires! S'étonna Kareen.

-Il pouvais largement se le permettre !En parlant d'honoraires justement, ne vas pas croire que je travaille pour toi gratuitement, glissa Sherryl, qui commençait à aborder la question financière.

-Si je ne te coffres pas pour port d'arme illégal, tu peux déjà t'estimer heureuse.

Quand un « bleu » vint soudain mettre un terme à la discussion:

-Sergent Adler, nous avons fini, vous pouvez venir inspecter la dépouille.

-A toi de jouer, Sherry , dit Kareen.

j'enfilai des gants en latex afin de ne pas contaminer d'éventuels indices avec mes empreintes. En me penchant sur le corps pour voir le visage de la victime, un grand frisson de stupeur envahit tout mon être. Je me sentis blêmir, les yeux écarquillés et des perles de sueur ruisselantes su le front,je fis un pas en arrière.

-Qu'est-ce que tu as, Sherryl? Miss Macabre ne supporte plus de voir la mort dans les yeux?

-Le problème n'est pas là.... Kareen Adler, je te présente la personne avec laquelle j'ai passé le Week-end.

-Parce qu'en plus, tu connais la victime!

-Oui, elle s'appelait Louise O'Toole, elle était la fille d'un chirurgien plastique qui tient son propre cabinet en ville. Pressentie pour reprendre l'affaire après ses études car son père commençait à se faire vieux.

Je l'ai filée jusqu'à hier en fin d'après midi. Je devais remettre mes résultats au client ce midi, au « Marlowe's ». Je connais par conséquent tous ses faits et gestes durant les trois jours qui on précédés sa mort. Je n'en dirais pas plus ici, secret professionnel oblige,mais vu qu'elle est morte, plus rien ne m'empêche de t'en toucher un mot...

Après avoir observé le corps sous divers angles,j'enfonçai un long thermomètre jusqu'au foie de la jeune femme pour estimer l'heure du décès, conjointement avec la rigidité cadavérique.

-Je peux te dire qu'elle est morte hier soir, mais chose curieuse, le foie n'est pas aussi froid que ce qu'il devrait être si elle avait passé toute la nuit étalée ici. De plus, avec le froid qu'il fait, la rigidité cadavérique aurait dû être ralentie, alors que nous avons ici un corps avec tous les muscles parfaitement contractés. Il est neuf heures, et le durcissement du corps (qui prend dix heures)ainsi que sa température laissent supposer, dans des conditions normales, sans froid ni humidité,qu'elle est morte hier soir, vers 19 heures.

Nous pensâmes alors à la même chose. Sans rien dire, Adler sortit son petit carnet de notes et y inscrivit deux mots: « corps déplacé ? ».Je détestais ces petits carnets aux feuilles plus fines que du papier biblique, avec leurs couvertures faites dans une matière indéfinissable. Ils étaient si souples que même le carnet du policier le plus soigneux aurait pu être tenu par un des enfants que j'avais avait bousculé sur O'Connel Street. C'est pourquoi je sortis alors l'agenda électronique que j'avais acheté la semaine précédente pour y noter les mêmes mots que Kareen sur le petit clavier, plus par envie de la narguer que par peur d'oublier mes idées.

Le corps avait été découvert depuis une heure à peine que déjà, les journaliste affluaient autour de la scène de crime, s'empressant de poser toujours les même questions: « Cette affaire a-t-elle un lien avec celle de Vendredi ? Dites nous-en plus! » et évidement, ils avaient déjà trouvés un surnom au potentiel tueur en série:

L'égorgeur de Dublin . Pourquoi il fallait donner un surnom à tous les tueurs en série? Certes, c'était très pratique pour faire référence à une affaire, comme celle de Jack l'éventreur, mais je trouve que cela donne trop d'importance à l'assassin au détriment des victimes, ce qui lui fournit en plus un public.

Tandis que le brouhaha incessant des journalistes s'intensifia, le Sergent Adler s'approcha de la fameuse ligne jaune.

-Assez!!! Hurla-t-elle. J'organiserai une conférence de presse quand nous en saurons plus. Pour l'instant , veuillez laisser la police faire son travail. Je me demande comment vous faites pour arriver aussi vite, vous êtes même arrivés avant l'équipe du légiste cette fois-ci!

-Alors qui est la jeune femme rousse que nous avons vus examiner le corps? Demanda une journaliste de l'Irish Gazette.

-Oh! Elle? C'est une ancienne collègue, elle est juste consultante !N'est ce pas Sherryl?

-Elle a bien dit Sherryl ! S'exclama la journaliste.

-Serait-ce....

-Oui,je suis Sherryl Brandon, Détective Privée, maintenant laissez nous faire...

Kareen ne savait plus où se mettre tandis que je me faisait photographier contre mon gré. Elle savait que dire aux journalistes que la police avait fait appel à un Détective revenait à admettre qu'ils étaient totalement perdus et impuissants dans cette affaire. Elle se dépêcha de faire charger le cadavre dans la fourgonnette de la morgue et s'adressa à moi:

-Tu veux faire un tour de Morgue-Mobile?

-Si cela peut m'éviter de rentrer à pied...

Le trajet en lui même ne fut pas du tout long, mais partir de la scène de crime fut particulièrement difficile en raison de l'exiguïté des lieux et des nombreux vans de presse qui avaient envahis la rue. Ces quelques minutes me laissèrent le temps de faire quelques prélèvements sanguins en vue d'analyses toxicologiques poussées, car même si la cause de la mort sautait aux yeux, il n'était pas impossible que ce ne soit qu'une mascarade visant à nous mettre sur une fausse piste. Malgré la vitesse du véhicule qui se servait de la sirène pour fendre la circulation, je réussis à m'accrocher. La sirène constituait l'un des nombreux avantages de la police que vantait Kareen, et elle ne se gênait pas pour en user, et même en abuser.

A notre arrivée à la morgue, je dus faire face aux retrouvailles avec toute l'équipe, que ce soit avec le commissaire Johnson, qui nous y attendait car il était pressé par le maire pour stopper le meurtrier, ou avec le Docteur Finnegan, le légiste. Il ne m'avais jamais apprécié, car il estimait qu' en ne faisant qu' empiéter sur ses plates bandes, je l'handicapais plus que je ne l'aidais. De mon côté, je constatais que le taux de résolution d'enquêtes avait considérablement baissé depuis mon départ. Et ce, car "l’éminent" Docteur Finnegan ne maîtrisait pas les nouvelles technologies. Il était donc souvent incapable d'identifier les victimes ou de déterminer si la victime avait été empoisonnée par tel pou tel poison. Un homme parfaitement incompétent en somme, cependant, avec sa maigreur extrême et ses remarques cinglantes, il pourrait aisément se faire passer pour un génie du crime.

- Miss White... dit le légiste en s'adressant l'ancienne squatteuse que je représentais à ses yeux.

-Docteur Finnegan, n'êtes vous donc pas au courant que je me suis mariée? répondis-je, irritée d'avoir été appelée par mon nom de jeune fille.

- Je sais aussi que votre mari s'est pris plusieurs balles dans le torse... ( ce qui me permit de ne plus vous avoir dans les pattes) Je pensait juste qu'en devenant veuve, vous récupéreriez votre ancien nom. répondit calmement le légiste.

- Et moi je pensait que vu votre incompétence, vous vous seriez fais congédié, mais visiblement, l'état aime bien jeter l'argent par les fenêtres...

- Bon assez de sarcasmes, vous avez une autopsie à faire! conclut Kareen.

-Comment ça "ON " a une autopsie à faire?

Le capitaine Adler remonta ensuite à l'étage, laissant les deux cerveaux se mettre au travail. Les rôles s'établirent spontanément, je récupérai toutes les analyses qui devaient s'effectuer avec les machines trop compliquées pour le réfractaire Finnegan et qui nécessitaient par ailleurs les prélèvement que j'avais pris soin d'effectuer lors du trajet.

Pendant que les machines travaillaient et que le légiste pratiquait son autopsie, j'en profitai pour monter prendre un café. Je ressentis un grand soulagement lorsque quittai la morgue, non pas parce que l'ambiance macabre me rebutait (c'était mon métier de base) mais parce que le simple fait de se retrouver seule avec cet énergumène me donnais des brûlures d'estomac.

Cette aversion atteignit son paroxysme lorsque le Docteur Finnegan pratiqua l'autopsie de Samuel Brandon, et qu'étant en pleine convalescence à ce moment là,je me retrouvais dans l'incapacité d'y assister. J'ai toujours été convaincue que le légiste avait négligé nombre de détails et même la copie du rapport d'autopsie qui m'avais été fournie me semblait incomplète.

-Alors, qu'est ce que ça donne pour l'instant? demanda Kareen.

- Le vieux fou travaille et les machines sont en route, donc pour l'instant, je peux enfin boire mon café! Non mais sérieusement, pourquoi vous le gardez encore?

-Ce n'est pas moi qui fait les équipes, la morgue se gère toute seule au niveau des effectifs, et comme c'est lui le directeur...

J'en tombai mon gobelet:

- Ce vieux débris sénile dirige la morgue! J'ai bien fait de partir, sinon je sais pas s'il serait encore en vie à l'heure actuelle!

-Oh toi! Oui le stagiaire, viens ramasser le café que la consultante à fait tomber!

-Ah parce que je suis Détective consultante maintenant!

-Tu devrais être flattée de faire le même métier que ton «grand oncle»!

-Oui, c'est vrai que tout comme lui, la police viens me trouver quand ils sont dans une impasse!

-Et toi, tu as vu la tête de ton Docteur Watson?

-Qui donc? demandai-je.

-Finnegan! répondit la blonde.

-Il a plutôt la tête d'un Moriarty en puissance!

-Qaund on parle du loup...

En effet, le fameux "Moriarty" en puissance fit irruption dans la salle de repos du commissariat, et au vu des quantités de sang qu'il avait sur sa blouse, le terme de "Moriarty" ne suffisait plus.

-J'ai trouvé quelque chose! dit enfin le légiste essoufflé.

-Votre cerveau? Demandai-je non sans une pointe de méchanceté.

-Non mieux! dit Finnegan avant de comprendre qu'il venait de se faire rabaisser devant tous les policiers présents. Suivez moi!

Nous nous précipitâmes tous trois à la morgue, s’installant autour de la table d'autopsie, puis le vieil homme commença son exposé:

- Pour commencer, la victime est morte hier soir à...

-19 heures, on le savait déjà, on sait aussi que le corps a été déplacé depuis un endroit à l'abri des intempéries... répondis-je en regardant mon agenda électronique.

-Alors vous le saviez aussi !? dit Finnegan en faisant mine de connaître cette information.

-Passez plutôt à ce qu'on ignore. dit Kareen.

-Oui, j'ai repéré de légères traces de pression aux extrémités de l'entaille qui marque son cou.

-Strangulation maquillée! m'exclamai-je, Vraiment fantastique!

-Impossible! rétorqua Kareen. Comment expliques tu que les marques de corde ne soient pas visibles tout autour du cou? Je crois que tu es rouillée, Sherry Brandy !

-Et avec un cintre? Si je prend un vieux cintre en fil de fer, je peux m'approcher de la victime par derrière, passer sa tête dedans avec le crochet en face de moi puis tirer un coup sec! Le cintre se déforme sous la pression que j'exerce et épouse le contour de son cou sans laisser de trace sur la nuque, ensuite il ne me reste plus qu'à attraper un objet tranchant et à faire une incision d'un côté à l'autre de la marque et le tour est joué!

-Fantastique! lâcha le Docteur dans un moment d'égarement.

-La reine de la déduction a encore frappé! Mais sans preuves concrètes, je crois que tu ne pourra pas corroborer ta théorie. lui dit Kareen.

-Pour commencer, techniquement je ne déduis pas, car la déduction est l'art de "deviner" les effets à partir d'une cause, tandis que mon boulot est de retrouver les causes à partir des effets,donc j'induis! Et justement, en parlant de preuves, regarde les yeux de la victime: il sont révulsés, signe qu'elle à subit une strangulation violente mais brève. D'autre part, regardez l'entaille du cou, vous y verrez des fragments de peinture écaillée, qui pourrait provenir du cintre,qui sont souvent entourés d'une gaine en caoutchouc peint. Quant aux analyses voyons ce que l'on peut en tirer.»

Je me dirigeai vers les machines poussiéreuses ( il était fort probable qu'elles n'aient jamais servies depuis mon départ ) et regardai les résultats.

«Je crois que la victime n'était pas consciente de ce qui se passait autour d'elle vu son taux d’alcoolémie, elle aurai même du être en coma éthylique. A vrai dire, elle était totalement ivre morte....»

Publié dans Pluie de balles

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A
sherryl n'aurait t'elle pas pu utiliser la lividité cadavérique pour determiner la date de la mort ? car si il a plu, la rigidité cadavérique n'est que trop imprécise
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A
... il y'a toujour le meme problème de page (repetition d'une vingtaine de paragraphe)<br /> ou sinon bon début d'histoire ^^
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